Par Faustine Léo Le 8 janvier 2021 à 19h18, modifié le 8 janvier 2021 à 19h22
Paul Ji a grandi bien sûr, perdant un peu de sa bouille d’enfant. Le pianiste de bientôt 17 ans, vainqueur de l’émission « Prodiges » l’an dernier, diffusée sur France 2, est certes plus bavard qu’il y a un an mais toujours plus introverti que sur scène. Il semble aussi logiquement traversé par quelques tergiversations d’adolescent, marquées par les épreuves liées à la pandémie de Covid-19. Sans pour autant douter de son amitié avec les 84 touches de son Steinway avec lesquelles il passe, sans aucune pression parentale, quatre à cinq heures par jour. Le disque qu’il vient de sortir chez Warner Classic, mêlant Chopin, Debussy ou Liszt, enregistré en août, en est la preuve.
« Mon but n’est pas de rester un prodige mais de devenir un musicien professionnel, insiste ce natif de Chicago (Etats-Unis) qui a intégré la prestigieuse public school anglaise d’Eton (Royaume-Uni) en septembre après avoir passé onze ans à Fontainebleau (Seine-et-Marne), bien conscient qu’une « carrière de pianiste, c’est difficile ». « Il me manque encore beaucoup d’étapes avant d’y parvenir. Comme de l’expérience », souligne-t-il.
Et pas facile en ces temps de pandémie de pouvoir se produire. « Il n’y aura peut-être pas de concert pendant deux ou trois ans. Alors je devrais peut-être trouver un autre métier », se projette-t-il un peu tristement dans le grand salon de cet appartement du 16e arrondissement de Paris où ses parents sino-américains ont emménagé à l’automne, installant le trophée de Prodiges sur la cheminée entre les figurines de Chopin, Beethoven et Liszt.
«Les confinements me permettent d’accroître mon répertoire»
Pourtant, à part espérer fouler les plus grandes scènes du monde pour offrir sa musique et apporter de la joie au public, Paul n’a pas vraiment d’autre projet de vie. « C’est magique ce que la musique peut apporter. J’aime partager ce que j’ai à dire avec mon piano. C’est aussi touchant de voir comment les gens réagissent », s’émeut-il dans un français parfait, lui qui fait office de traducteur pour ses parents depuis ses 7 ans.
C’est sans doute cette sensibilité qui a convaincu Steinway, le plus prestigieux fabricant de piano, d’en faire il y a quelques semaines un de ses ambassadeurs en le promouvant Young Artist de son label. « Nous ne sommes qu’une centaine dans le monde. C’est un grand honneur », se réjouit-il, toujours humble, rappelant au passage le vivier que constituent les dizaines de millions de jeunes qui jouent du piano dans le monde.
Jamais il ne s’appesantit sur les longues heures de travail qui sont nécessaires pour parvenir au niveau qui est le sien. « Les confinements, en France et maintenant en Angleterre, me permettent d’accroître mon répertoire. J’ai encore beaucoup à apprendre », se contente-t-il de dire, demandant entre-temps des conseils de lecture de classiques de la littérature française.
Il a offert aux soignants un concert en ligne pour le Nouvel An
Son disque mêle déjà seize titres des plus grands compositeurs comme Schumann, Debussy, Rachmaninov, enregistrés à la Seine Musicale à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). « J’ai passé quatre jours hors du monde, se souvient celui qui demandera la nationalité française à sa majorité. Un enregistrement, c’est quelque chose de gravé, quelque chose qui reste. En direct, à la télévision, on s’exprime, c’est amusant. Là, j’ai voulu être perfectionniste, imprimer mon style. Je crois que ça m’a fait passer une étape ». Tout en gardant un peu de candeur. « Ça m’a fait bizarre de voir mon disque dans les magasins », s’amuse-t-il en effet.
Dans ses moments de doutes comme dans le texte du livret de son album, Paul pense à ceux qui souffrent et à comment les soulager. Déjà familier de l’hôpital de Fontainebleau où, avec sa sœur pianiste elle aussi, il a offert plusieurs fois une parenthèse enchantée à des malades, il veut donner une envergure supplémentaire à son projet « Music for good ».
« Je veux mettre en relation des hôpitaux et des musiciens pour organiser des concerts, explique-t-il. Il faut utiliser la musique pour faire le bien ». En attendant de pouvoir se déplacer, il a mis en ligne pour le Nouvel An un concert dans lequel se produisent des jeunes talentueux comme lui, dont la plupart ont participé à Prodiges. Un concert que, fidèle à son grand coeur, il dédie aux soignants et aux scientifiques qui ont trouvé des vaccins.
Paul Ji, Piano, « Prodiges 6 », chez Warner, 16,99 euros dans les magasins. Disponible également sur les plateformes de téléchargement.
Original Source – LE PARISIEN: https://www.leparisien.fr/seine-et-marne-77/fontainebleau-le-prodige-du-piano-paul-ji-monte-en-gamme-08-01-2021-8418026.php
Add Comment